Ce Mercredi 8 mars, j’interrogeais le Ministre Bernard Clerfayt sur le Service Citoyen à Bruxelles et les perspectives qu’il offre en matière d’emploi, d’insertion professionnelle, de formation.
Retrouvez ici nos échanges à ce propos :
Récemment, nous avons constaté le renouvellement du poste de dépense de 400.000 euros alloués à l’initiative du service citoyen. Ce service citoyen, s’il faut le rappeler, consiste à proposer aux jeunes (118 en 2022) de participer à un projet commun qui a du sens. S’il leur offre des perspectives de mise à l’emploi ou de réinsertion dans le parcours scolaire, il renforce aussi leur participation à des programmes utiles à la société. Ce service peut s’effectuer dans des domaines variés : la culture, l’éducation, l’environnement, l’aide aux personnes ou encore l’éducation sportive. Autant de projets porteurs et nécessaires, qui offrent de réelles perspectives.
Les chiffres sont réjouissants : 75 % des jeunes qui sortent du service citoyen reprennent des études ou retrouvent du travail. De telles initiatives, quand elles sont encadrées, suivies et évaluées, donnent des résultats particulièrement encourageants, surtout si la démarche est volontaire. Offrir des perspectives aux jeunes en favorisant leur insertion dans le marché de l’emploi est primordial !Si nous pouvons nous réjouir de l’ensemble de ces avancées, il convient toutefois de vous interroger sur divers points.Le programme de service citoyen offre un ensemble de formations nécessaires pour favoriser la mise à l’emploi. Elles doivent cependant respecter des critères d’utilité et d’adaptabilité. La formation n’est en effet pertinente que si elle est adaptée aux besoins du public cible. Dans quelle mesure les différents profils sont-ils pris en considération dans l’offre de formations ?
Nous savons que ce dispositif est aussi mis en œuvre en Wallonie. Êtes-vous en contact avec vos homologues wallons afin de partager les constats, les évaluations et les éventuelles pistes d’amélioration du dispositif ?
Dans quelle mesure est-il prévu d’étendre le nombre d’organismes participant à ce projet commun ?
Les métiers porteurs ou en pénurie sont-ils concernés par le service citoyen ? Comment ces métiers sont-ils intégrés au dispositif ? Quelles actions sont-elles mises en place pour assurer le suivi des jeunes ayant terminé cette période de service citoyen ?
Dans quelle mesure sont-ils accompagnés dans leur recherche d’emploi, de formation ou de poursuite du cursus scolaire ?
La réponse du Ministre :
Si la vocation générale du service citoyen, d’ailleurs soutenu par le gouvernement, m’enthousiasme, ce service n’a toutefois pas pour premier objectif la mise à l’emploi. Ce projet vise, avant tout, plus globalement, à favoriser le développement personnel des jeunes ainsi que leur intégration dans la société, grâce à l’apprentissage de règles de travail collectif et d’une implication sociale. Le but est de faire d’eux des citoyens actifs, critiques, solidaires et responsables.
Nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises, le service citoyen vise quatre objectifs principaux :
– le développement personnel : mieux se connaître, mieux interagir avec les autres et définir les bases de son projet de vie (émancipation, capacitation) ;
– la cohésion sociale : rencontre, échange et création de liens entre individus aux profils socioculturels différents,
– la citoyenneté ;
– la solidarité.Des formations sont effectivement données par des organisations et groupements de jeunesse partenaires, des associations d’éducation permanente ou des ASBL. Elles portent sur des thèmes transversaux et questions de société prégnantes, mais elles ne sont pas orientées vers les métiers. Ces formations touchent à des thèmes de société généraux qui interpellent les jeunes, comme les enjeux climatiques ou la lutte contre la précarité. Elles leur offrent une meilleure compréhension de la société au sein de laquelle ils peuvent ainsi mieux trouver leur place. Les thèmes vont de l’interculturalité à l’environnement, en passant par le climat, la mobilité, le bien-être, l’entrepreneuriat, le genre, les médias, la citoyenneté, l’intergénérationnel et les premiers secours (par la Croix-Rouge). L’objectif est de leur apprendre quelque chose, de susciter le débat, les réactions et l’implication des jeunes sur ces questions.
Concernant le public et l’adaptation des formations à ce dernier, le programme de formation du service citoyen est quasi identique pour tous, mais les méthodologies d’intervention, les partenariats et l’accompagnement des jeunes par les équipes permettent de s’adapter au mieux aux attentes et profils des jeunes concernés.
Un tronc commun de formations est dispensé par des opérateurs extérieurs sur la base de méthodes actives et participatives. Chaque jeune peut également choisir deux formations dans un panel de huit à quinze thématiques, en fonction du nombre de promotions de jeunes en cours. Ces thématiques doivent au moins répondre à un des quatre objectifs généraux de la plateforme – développement personnel, cohésion sociale, citoyenneté engagée, solidarité – ou correspondre aux centres d’intérêt des jeunes, en fonction de leurs vécus et des thématiques d’actualité.
Les formations s’adressent à des groupes mixtes de jeunes faiblement qualifiés et d’autres qui le sont fortement et adoptent une stratégie de nécessaire bienveillance en raison des parcours personnels des jeunes, parfois particulièrement délicats.
Concernant notre contact avec la Région wallonne, des échanges se tiennent entre mon cabinet et celui du ministre-président wallon pour échanger les résultats et les bonnes pratiques. L’opérateur qui travaille sur les deux Régions y est bien accueilli et la coordination est bel et bien là avec la Wallonie.Vous me demandez s’il est prévu d’étendre le nombre d’organismes participant à ce projet commun. Le service citoyen dispose déjà d’un réseau impressionnant de partenaires à Bruxelles et en Belgique. Il s’appuie sur plus de 850 organisations d’accueil qui sont des ASBL, des services publics (communes, CPAS, provinces, intercommunales) ou des sociétés à finalité sociale. Plus de 1200 missions sont ainsi proposées sur l’ensemble du territoire belge, dans les secteurs de l’environnement, de l’aide aux personnes, de la culture et de l’éducation par le sport. La liste des partenaires se trouve sur le site service-citoyen.be.
À ces partenaires d’accueil s’ajoutent les partenaires de formation et les partenaires de mobilisation et d’orientation, parmi lesquels Actiris, Bruxelles Formation et la Cité des métiers de Bruxelles . Dans le cadre du service citoyen, le jeune recevra une ou deux séances de ces organismes publics pour un premier contact et une préparation à un travail de formation professionnelle ou d’incitation à l’emploi.
La croissance de l’offre de missions et donc du nombre de ces partenariats dépend du financement disponible. Comme je l’ai déjà mentionné lors de précédentes questions parlementaires, la contribution financière de la Région reste constante en vue de maintenir l’offre. Je souhaiterais l’augmenter si l’ensemble des priorités me le permettaient. C’est d’ailleurs le cas de tous les postes sur lesquels vous m’interrogez, mais il faut tenir compte des réalités budgétaires de la Région.
Vous m’interrogez sur le lien entre le service citoyen et les métiers porteurs ou en pénurie. Comme je l’ai évoqué, le service citoyen n’a pas de visée de formation professionnelle directement orientée vers un métier. Il ne délivre pas de certification qualifiante. Les actions de formation portent sur l’acquisition de compétences générales en lien avec la mission dans les secteurs suivants : aide aux personnes, accès à la culture et à l’éducation, environnement et éducation par le sport.
En fin de mission, le jeune aura acquis des compétences qui lui permettront de poursuivre son parcours dans ces domaines. Il s’agit surtout de compétences personnelles. Il aura pu améliorer son interaction avec les autres, sa capacitation, il aura pris confiance en lui, se saura désormais capable de prendre la parole en public, de donner un exposé ou de mener un projet à terme. Toutes ces aptitudes sont nécessaires à la poursuite de son projet de formation professionnelle, d’étude ou de recherche d’un emploi.
Quant aux actions mises en place pour assurer le suivi des jeunes ayant terminé le service citoyen, celui-ci se termine après six mois et il n’y a pas de suivi continu au-delà de cette période. Une enquête de suivi est envoyée à chaque participant six mois après la fin du service. Pour bénéficier d’un accompagnement vers l’emploi, le jeune doit s’adresser aux opérateurs publics spécialisés, qu’il abordera sans doute avec plus d’assurance et de connaissance grâce au service citoyen.
Un partenariat entre Bruxelles Formation et le service citoyen facilite l’accès aux formations qualifiantes des jeunes l’ayant accompli. Une convention lie le service citoyen et Bruxelles Formation pour l’accueil de 120 jeunes de 16 à 25 ans.
Le service citoyen ne relève pas explicitement des compétences régionales, ce n’est pas un opérateur de mise à l’emploi, mais le gouvernement bruxellois lui assure un financement annuel de 400.000 euros issu de la stratégie 2030. Je suis globalement très satisfait de ce service et déplore que le contexte budgétaire régional nous offre trop peu de perspectives pour augmenter cette subvention.
Et ma réplique :
Le service citoyen n’a bien sûr pas pour objectif premier de mettre les jeunes à l’emploi, mais peut constituer un tremplin d’accrochage professionnel, par le biais d’une formation qualifiante.
La mission du service est de mettre des jeunes éloignés de l’emploi en contact avec une société dont ils sont « désaffiliés ». Cette expérience leur permet de retisser des liens. L’objectif est donc la cohésion sociale, mais, dans le cadre de l’évaluation réalisée six mois après la fin du service citoyen, on pourrait réfléchir à renforcer les outils d’accompagnement disponibles pour maintenir la motivation du jeune. Il faut continuer, dans notre démarche volontariste, à leur proposer des offres de formation. Les métiers porteurs et en pénurie que j’évoquais donnent l’occasion d’outiller professionnellement ces jeunes et de les mettre progressivement à l’emploi. Je sais que les moyens sont dérisoires, mais cette réflexion vaut la peine d’être entamée.