Le 16 mai dernier, perspective.brussels a publié la troisième édition de son rapport concernant le diagnostic socioéconomique, territorial et environnemental de la Région de Bruxelles-Capitale à la suite de la pandémie de Covid-19. Les constats, connus de longue date, se voient ainsi formalisés, actualisés et chiffrés une nouvelle fois. Le rapport rappelle d’emblée que la crise sanitaire a lourdement aggravé la situation des Bruxellois les plus précaires. Les impacts sanitaires ainsi développés pointent plusieurs statistiques inquiétantes, particulièrement dans le chapitre consacré aux conséquences sociales.

En effet, « la moitié de la population bruxelloise est en situation de risque de pauvreté vit dans des logements considérés comme trop exigus par rapport à la taille de leur ménage ».
Le rapport constate aussi une augmentation généralisée des demandes de revenu d’intégration sociale et des autres aides sociales. L’augmentation du nombre de bénéficiaires d’un revenu d’intégration sociale est estimée à 32,5 % entre janvier 2020 et juillet 2021 en Belgique, toutes aides sociales complémentaires confondues, avec des augmentations marquées concernant l’aide alimentaire (+51 % entre septembre 2020 et mars 2021) et l’aide à la médiation de dettes (+46 % entre janvier 2021 et juillet 2021)

Le niveau est donc bien plus élevé qu’avant la crise. Le rapport pointe également le risque de non-recours aux aides sociales en raison de la numérisation des services d’aide, dont l’offre reste inaccessible à une grande partie du public vulnérable.

  • Comment la question est-elle traitée au sein du gouvernement bruxellois ? Comment travaillez-vous sur ces sujets transversaux avec vos homologues, et sur l’accès au logement abordable et durable en particulier, avec la secrétaire d’État au logement ?

  • Si on met en perspective le chapitre sur la situation de l’emploi et sur le volet social en particulier, avez-vous étudié la possible reconversion de bureaux en lieux d’accueil de jour et/ou de nuit, voire en logements durables pour les personnes sans chez-soi ? Cette appellation me semble plus pertinente pour désigner la réalité de ce public cible.

  • Outre le plan social-santé intégré que nous attendons prochainement et impatiemment, que mettez-vous concrètement en place pour aider les travailleurs sociaux et, de manière plus générale, les acteurs de première ligne dans les services numérisés, afin de démocratiser l’accès numérique aux publics vulnérables ?

  • Enfin, avez-vous des contacts avec votre homologue fédérale, Mme Lalieux, en vue d’apporter de façon complémentaire et conjointe une aide concrète aux CPAS, qui l’attendent aussi impatiemment et en ont fortement besoin ? Dans l’affirmative, sur quoi vos discussions ont-elles débouché ?

  • La piste des budgets supplémentaires alloués aux CPAS est-elle envisagée à l’heure actuelle ? Si oui, quel serait le montant de cette enveloppe complémentaire octroyée aux CPAS ? Comment la Fédération des CPAS bruxellois est-elle associée à la recherche de solutions ?

Monsieur le Ministre Alain Maron m’a répondu : 

Pour répondre à votre question sur le volet emploi et social, le gouvernement a chargé l’asbl Bruss’help de mettre en œuvre la mission visée à l’article 65,4° de l’ordonnance, à savoir « soutenir le développement d’initiatives de prospection de logements stables au profit des centres qui pourront proposer des solutions de logement aux personnes sans abri ». Cette mission est à intégrer dans le plan d’action de l’asbl. Ce chantier concerne principalement l’accompagnement et le suivi des dispositifs déployés dans le cadre du plan de relance ainsi qu’une évaluation de l’impact de ce dernier, entre autres par une analyse des trajectoires d’insertion ou de la formule d’accueil au sein des différentes structures, par exemple dans les hôtels. Il est demandé d’identifier des leviers pouvant faciliter la recherche de logements et d’infrastructures et de pouvoir construire un cadre cohérent de coordination des outils de captation et d’attribution des logements.

Ce chantier comprend également la rédaction d’un référentiel d’évaluation basé sur une analyse des outils existants et tenant compte des retours des différents types d’opérateurs. Cette mission de soutien et de prospection de logements stables doit aussi être mise en lien avec la fonction de coordination, d’orientation et de suivi, ainsi qu’avec la mission d’évaluation de Bruss’help. Dans le cadre du plan de relance, l’asbl Bruss’help a déjà été amenée à identifier les bureaux disponibles sur le territoire bruxellois et qui pourraient servir de logements à court ou moyen terme.

Cette prospection a été menée en collaboration avec SoHoNet, dont le rapport identifie plusieurs lieux. La réflexion quant à l’occupation de ces sites, laquelle nécessite des aménagements et soulève une série de questions de garanties (sécurité incendie, assurance, accompagnement, cadre conventionnel, affectation urbanistique, etc.), est encore en cours au sein de Bruss’help. Cette mission implique en effet que l’asbl développe une série d’outils. Par ailleurs, d’autres asbl recherchent des bureaux qui pourraient être transformés en lieux d’hébergement. C’est notamment le cas du New Samusocial qui, afin d’assurer l’accueil supplémentaire de familles sans abri, a trouvé un bâtiment de bureaux sur le territoire de la commune d’Auderghem.Après quelques travaux et l’introduction d’un permis d’urbanisme, le site est occupé comme centre d’accueil depuis fin février. Q

uant au soutien aux travailleurs de première ligne afin de démocratiser l’accès numérique aux publics vulnérables, le plan social-santé intégré, et plus précisément l’axe 2 « Assurer à chaque Bruxellois un parcours de soins accessible et cohérent », a pour objectif d’améliorer la communication entre les acteurs de soins, et entre les acteurs et les patients par le soutien de la qualité et la sécurité des soins ; le renforcement de la coordination des professionnels de soins et la multidisciplinarité de la prise en charge ; l’aide apportée au patient afin de devenir un partenaire actif de sa santé.

S’il est clair qu’en tant que membre du Collège réuni, je ne manque pas d’interpeller Mme Lalieux à propos de moyens complémentaires, elle est surtout particulièrement réceptive aux demandes effectuées par les CPAS eux-mêmes. Nous appuyons donc la Fédération des CPAS bruxellois pour qu’avec les autres fédérations, wallonne et flamande, elle interpelle la ministre pour qu’elle réponde aux besoins sociaux supplémentaires.

La Région a effectivement accordé une enveloppe de 20 millions d’euros supplémentaires aux CPAS en 2022. Un montant de 10 millions d’euros est destiné à l’augmentation des besoins sociaux résultant de la hausse des prix de l’énergie, sachant que ce montant pourrait être augmenté si le besoin s’en faisait sentir, et 10 millions d’euros sont octroyés pour poursuivre les projets engagés grâce à la subvention exceptionnelle de 30 millions qui a été accordée à cheval sur les années 2020 et 2021.L’objectif de cette subvention était de permettre aux CPAS de faire face aux différentes conséquences sociales de la crise du Covid-19.

Par rapport à la problématique de l’énergie, le soutien octroyé par l’entremise des CPAS constitue l’un des leviers les plus importants pour empêcher certains ménages de sombrer dans une spirale de surendettement. C’est la raison pour laquelle ces moyens complémentaires sont mis à la disposition non seulement des ménages précaires, mais aussi des ménages issus des classes moyennes, dont les revenus dépassent le plafond d’accès au tarif social et au système BIM, même s’ils rencontrent des difficultés pour payer leur facture d’énergie.

Nous discutons actuellement avec la Fédération des CPAS bruxellois de la mise en place d’un suivi de la consommation du subside, pour examiner si les moyens sont suffisants pour l’année
2022 et ce qu’il en est de leur affectation concrète, sachant qu’une partie doit être utilisée sous forme d’aides directes. Il est à noter également que les subventions allouées aux coordinations sociales ont été augmentées pour permettre à chaque CPAS d’employer un temps plein dévolu à la
coordination sociale.

Le Fonds spécial de l’aide sociale est une subvention régionale annuelle de la Cocom pour aider les CPAS à remplir leur mission d’action sociale à destination des Bruxellois. Il est réparti selon les règles fixées par l’arrêté du 27 juillet 2017 fixant les règles de répartition de la dotation générale aux communes et aux CPAS de la Région de Bruxelles-Capitale. En 2022, ce sont ainsi plus de 33 millions d’euros qui s’ajoutent aux moyens déjà cités. Enfin, signalons encore que 900.000 euros sont octroyés de façon récurrente aux CPAS afin de soutenir leurs services de médiation de dettes.

Retrouvez nos échanges ci-dessous : http://weblex.irisnet.be/data/arccc/biq/2021-22/00019/images.pdf