Voici ma question adressée à M. Maron :

 » Je souhaite faire le point sur la situation du sans-abrisme en Région bruxelloise – comme nous le faisons régulièrement au sein de cette assemblée – à la lumière de la vague de froid et de la propagation du variant omicron, qui vient quelque peu bousculer la gestion du sans-abrisme à Bruxelles. Je voudrais plus particulièrement centrer le débat sur la prise en charge des personnes sans abri. Certes, celle-ci est déjà assurée par les nombreux services et les travailleurs sociaux qui, grâce à leur travail considérable, soulagent les maux de ce public cible.
Toutefois, étant donné le contexte météorologique et l’actualité sanitaire, j’aimerais savoir dans quelle mesure les services sont amenés à se réorganiser en interne. Comment la prise en charge de cette population vulnérable que sont les sans-abri s’opère-t- elle dans les centres d’accueil ? Disposez-vous du nombre précis de personnes vaccinées, non vaccinées, hospitalisées et contaminées ? Des aides matérielles ou financières complémentaires sont-elles prévues dans ce contexte particulier de la vague de froid et du variant omicron, pour renforcer les équipes et les structures d’accueil qui travaillent à flux tendu ? »

Monsieur le Ministre m’a répondu ;

« En préambule, je vous renvoie à ma très longue réponse donnée en commission de la santé du 16 décembre 2021. J’y avais exposé dans le détail la capacité d’accueil de nuit et d’accompagnement mise en œuvre pour cet hiver. J’y avais également expliqué la manière dont les recommandations formulées par Bruss’help dans un avis d’initiative transmis le 26 novembre dernier avaient été prises en considération. Pour donner suite à la recommandation relative à l’accueil de familles, 50 places supplémentaires d’accueil d’urgence de familles ont été ouvertes dans un hôtel, le 15 décembre dernier.
Nous avons par ailleurs décidé d’augmenter la capacité d’accueil de familles en maison d’accueil, en complément des 499 places accessibles à ce public en maison d’accueil, dont 45 avaient déjà été créées en 2021. Un appel aux maisons d’accueil souhaitant étendre leur capacité a été lancé le 23 novembre dernier. Le résultat de cet appel sera communiqué la semaine prochaine aux opérateurs concernés. Par ailleurs, une nouvelle maison d’accueil à destination des femmes victimes de violences verra le jour prochainement.
Concernant les autres suites réservées aux recommandations de cet avis d’initiative et le détail de la capacité d’accueil et d’accompagnement, je vous renvoie à ma réponse du 16 décembre dernier.

Concernant la capacité d’accueil de personnes et familles, Bruss’help est chargée, en étroite concertation avec les acteurs du secteur, de contrôler l’adéquation de l’offre d’accueil, en tenant compte des capacités récemment créées et de celles qui le seront dans les semaines et mois à venir, à destination des familles. Bruss’help devrait rendre un nouvel avis prochainement.
En ce qui concerne le contexte de la vague omicron actuelle, je tiens avant toute chose à saluer la mobilisation des professionnels du secteur de l’aide aux personnes sans abri qui font face à la crise sanitaire depuis presque deux ans. La gestion du Covid-19 pour les publics les plus précaires fait l’objet de toute notre attention depuis deux ans et, avec les acteurs concernés, nous nous sommes énormément investis sur cette question.
Actuellement, la circulation très importante du variant omicron et l’augmentation des infections accroissent la pression sur tous les secteurs, y compris celui de l’aide aux personnes sans abri, ce qui a pu entraîner des tensions dans certains lieux d’hébergement. Une circulaire a été transmise au secteur la semaine dernière : elle vise à cibler les personnes sans abri qui présentent le plus de fragilités, de manière à les mettre prioritairement à l’abri et à diminuer les risques. Il a été demandé à l’ensemble des lieux d’hébergement de procéder prioritairement à des tests antigéniques rapides, qui ont été mis gratuitement à disposition de l’ensemble des centres en nombre suffisant. Les règles et recommandations relatives à l’isolement des personnes positives et à la mise en quarantaine des contacts à haut risque ont été rappelées dans cette circulaire. Il est évident que le contexte actuel est complexe pour les lieux d’hébergement, sachant qu’une partie du personnel est également positive, ce qui fragilise les équipes. Nous menons un dialogue permanent avec le secteur, avec l’outbreak support team sans-abri et avec le projet Combo – qui s’adresse aux personnes sans abri présentant des problématiques d’assuétudes et/ou de santé mentale – pour examiner la manière dont ils peuvent venir en soutien des structures d’hébergement et leurs usagers sur les dimensions sanitaires.

À cela s’ajoute l’ensemble des dispositifs d’aide en santé mentale et assuétudes qui accueillent ces publics en présentiel et par téléphone pour les prendre en charge. Par ailleurs, les personnes sans abri infectées peuvent, depuis le début de la crise sanitaire, être accueillies dans un centre de confinement. Actuellement, il en existe un au centre Lemonnier, et sa capacité est de 70 lits. Bruss’help continue à assurer un rôle d’orientation des personnes testées positives. Le service d’orientation vers le centre Lemonnier est disponible sept jours sur sept.
En matière de vaccination, il n’est pas possible de disposer de chiffres fiables relatifs au public sans abri.
Toutefois, il ressort de l’évaluation du dispositif mobile de vaccination pour les personnes sans abri, Mobivax, mis en place dès le début de la crise sanitaire, qu’environ 2.000 personnes sans abri ont pu être vaccinées entre mai et octobre 2021. Ce dispositif avait été mis en place dans le cadre d’un partenariat entre la Croix-Rouge, Médecins du monde, Médecins sans frontière et le Samusocial avec l’aide de la Cocom. En outre, à partir de juin 2021, d’autres actions de vaccination mobiles ont été menées par la Cocom et relayées par Bruss’help auprès des acteurs de terrain. Elles ont permis de cibler des collectifs de prostitués, des usagers de drogues, etc. Dans ce cadre, environ 2.900 doses ont été administrées. Bruss’help, chargée de suivre la stratégie de vaccination au sein du secteur, en conclut que, malgré le profil du public sans abri, éloigné des soins et souvent hésitant à se faire vacciner, leur couverture vaccinale est similaire à celle de la population bruxelloise.
Ce résultat est à mettre en rapport avec le fait que l’ensemble des structures d’hébergement – centres d’urgence et d’insertion – ont été touchées par la campagne de sensibilisation et, ensuite, par les équipes de vaccination. Les actions de sensibilisation et de vaccination menées ont également permis l’accès des personnes sans papiers aux centres de vaccination.
Concernant le renforcement des opérateurs, nous examinerons également les éventuels coûts supplémentaires auxquels les centres d’hébergement doivent faire face et la manière dont ceux- ci peuvent être couverts par les crédits Covid-19 disponibles. S’agissant de la suite réservée aux recommandations de la commission délibérative, une commission portant spécifiquement sur cette question sera organisée très prochainement.
Enfin, en ce qui concerne les questions complémentaires portant sur les liens avec le niveau fédéral, des réunions de travail ont lieu entre le secrétaire d’État à l’asile et la migration, Sammy Mahdi, et le président du Collège réuni, Rudi Vervoort. Le dialogue entre la Région bruxelloise et l’État fédéral n’est donc pas rompu. Ce dernier a d’ailleurs ouvert des centres de pré- accueil, uniquement accessibles aux personnes qui ont introduit une demande d’asile. Il y a donc eu une petite amélioration par rapport à la situation catastrophique connue antérieurement.
Cependant, cela ne couvre pas l’entièreté du champ puisque certaines personnes n’introduisent pas une demande d’asile même si elles sont présentes sur notre territoire. À ce stade, le niveau fédéral refuse toujours de les prendre en considération. Remarquons également que les efforts fournis par les deux autres Régions sont proportionnellement bien inférieurs à ceux consentis par la Région bruxelloise à l’égard du sans-abrisme. On peut même les qualifier de négligeables. Il faut souligner qu’à Bruxelles, le nombre de places disponibles, les moyens mis en place pour l’accompagnement de ces personnes et les budgets sont sans commune mesure avec ce qui se passe dans les deux autres Régions. Dans ce domaine, ces deux dernières ne font pas solidarité par rapport à Bruxelles. Elles se gardent bien d’ouvrir des places, en tout cas un nombre de places suffisant pour qu’il soit proportionnel à celui de Bruxelles. Si ces places existaient dans d’autres villes, les personnes s’y rendraient.

Ne nous voilons pas la face. S’il y a une concentration de la problématique à Bruxelles, il y a aussi une forme de concentration, y compris de la part des députés, de l’obligation
de réponse sur les épaules de la Région de Bruxelles-Capitale. Ce n’est pas correct, tout le monde doit assumer sa part de responsabilités, y compris les autres Régions. On parle d’un public qui n’est pas nécessairement établi à Bruxelles. Il se déplace dans notre Région pour y profiter des systèmes d’aide mis en place. Il faut prendre conscience du fait que l’effort de la Région bruxelloise à l’égard de ce public extrêmement précarisé est colossal au regard de ce qui est mis en œuvre dans les deux autres Régions. Gardons cela à l’esprit. Au mois d’avril, j’avais écrit à Mme Lalieux pour relancer le groupe de travail sans-abri, qui existe dans le cadre de la conférence interministérielle de l’intégration dans la société. Mme Lalieux n’ayant pas donné suite à ce courrier, je vais la relancer car cette problématique doit être discutée entre les entités afin de trouver, ensemble, des solutions structurelles.

Retrouvez le compte-rendu intégral des interventions ci-dessous :

http://weblex.irisnet.be/data/arccc/biq/2021-22/00006/images.pdf#page=36