Voici ma question adressée à M. le Ministre :
« Pour le groupe Ecolo, l’harmonisation des pratiques dans les CPAS bruxellois est importante à plusieurs titres. Il s’agit d’ailleurs d’une volonté du gouvernement bruxellois inscrite dans sa déclaration de politique régionale.
En juin 2020 déjà, je vous interrogeais sur l’harmonisation des pratiques au sein des dix-neuf CPAS de la Région, l’objectif étant de garantir l’accès aux mêmes soins de santé et pharmaceutiques, en ce compris l’aide médicale urgente, quel que soit le lieu de résidence sur le territoire régional. Je rappelle d’emblée qu’il ne s’agit pas d’effectuer un nivellement vers le bas, mais bien d’assurer une meilleure cohérence de ces pratiques. Pour les personnes qui émargent au CPAS, il est toujours très difficile de s’y retrouver dans les pratiques et règlements disparates. L’harmonisation doit aller de pair avec une augmentation des revenus sociaux et une individualisation des droits sociaux. Certes, il s’agit là de compétences fédérales, mais il importe de les lier à l’harmonisation des pratiques dans les CPAS.
Pour illustrer mon propos, je citerai l’exemple de la carte médicale, dont les conditions d’octroi diffèrent d’un CPAS à l’autre. Bien qu’elles tiennent compte des réalités et des particularités de chaque commune, ces pratiques disparates rendent laborieuses les procédures de demande d’aide. Des témoignages allant dans ce sens me reviennent régulièrement du terrain. L’harmonisation des pratiques en la matière viserait donc la simplification de l’octroi de la carte médicale et son ouverture à l’ensemble des CPAS. Une telle harmonisation ne peut donc se faire au détriment des usagers et ne doit pas occulter la source du problème, à savoir le sous-financement des politiques sociales, en particulier pour les minima sociaux.
En réponse à ma précédente interpellation sur le sujet, vous annonciez qu’un chantier était en cours, incluant l’élaboration d’un plan d’action en concertation avec la Fédération des CPAS bruxellois. Un an et demi plus tard, où en est ce processus d’harmonisation ? Quel est le calendrier précis du plan d’action ? Où en êtes-vous dans son élaboration et sa mise en œuvre ? Quels acteurs avez-vous consultés ou consulterez-vous ?
Quand la dernière réunion du groupe de travail sur les groupes vulnérables a-t-elle eu lieu ? Sur quoi a-t-elle porté ?
Le renforcement des CPAS et leur harmonisation ont-ils été évoqués ? Dans l’affirmative, qu’en ressort-il ?
S’agissant d’un sujet transversal, des discussions ont-elles eu lieu avec vos homologues fédéraux ? Dans l’affirmative, sur quoi ont- elles débouché ? »
Voici ce que le Ministre m’a répondu :
Comme répondu à monsieur Köksal en décembre, sur la base des informations transmises par la Fédération des CPAS bruxellois et à la suite de l’enquête sur les pratiques et politiques des CPAS bruxellois en matière de soins de santé, un état des lieux des disparités en la matière a pu être réalisé en septembre 2019.
En raison des départs des personnes porteuses de ce projet au sein de la Fédération des CPAS bruxellois de Brulocalis, du manque de moyens humains au sein de la fédération en général, ainsi que de l’impact de la crise sanitaire pour tous les acteurs concernés, la mise en place d’un groupe de travail qui puisse se saisir du suivi du dossier au sein de la fédération n’a pu se constituer qu’en début d’année 2021. Les CPAS ont dû faire face à une énorme crise sociale ainsi qu’à une augmentation de la charge de travail pendant cette période difficile.
Les services du Collège réuni, mon cabinet et moi-même avons suivi de très près l’évolution au sein de la Fédération des CPAS bruxellois durant la dernière année, ainsi que l’accompagnement des CPAS dans l’utilisation des 30 millions d’euros complémentaires qui leur ont été accordés en 2020-2021. C’est dans ce cadre que les membres du Collège réuni compétents pour la politique d’action sociale, en collaboration avec les services du Collège réuni et mon cabinet, ont invité, au début de l’année, la Fédération des CPAS bruxellois à préciser, dans sa demande de subside facultatif pour 2021 à la Cocom, tous les objectifs et missions favorisant une harmonisation des pratiques des CPAS. Les objectifs prioritaires suivants ont été inclus dans le projet de 2021 :
– la mise en œuvre de la note sur la simplification administrative dans l’accès aux soins de santé ;
– l’automaticité du maintien de la carte médicale lors du changement de commune ;
– la constitution d’un groupe de travail visant à faire des propositions quant au contenu minimal commun aux dix-neuf CPAS des cartes médicales ;
– la mise à jour de la liste des médicaments D (non remboursables par l’Inami et pris en charge par les CPAS) ;
– la constitution d’un groupe de travail réunissant les partenaires de la santé, afin d’étudier des mesures concrètes de simplification administrative dans l’accès aux soins en général, et plus spécifiquement à l’aide médicale urgente.
En ce qui concerne l’état d’avancement, nous savons que plusieurs groupes de travail ont été lancés. Le comité directeur de la Fédération des CPAS a bien acté la volonté politique d’harmoniser les pratiques en matière de santé, y compris lors des rencontres officielles entre le président et le bureau de la Fédération des CPAS bruxellois et moi-même. Il y a trois jours, lors de notre dernière réunion, les membres du bureau m’ont réitéré cette volonté d’harmonisation de principe. Le bureau de la Fédération des CPAS ne représente pas les dix-neuf CPAS de la Région, ce qui signifie que tout n’est pas encore joué. Le bureau est néanmoins représentatif de la diversité politique au niveau des CPAS bruxellois. Pour votre information, il convient de distinguer les personnes qui sont en règle avec la mutuelle pour l’obtention de soins ambulatoires, c’est-à-dire les personnes disposant d’un titre de séjour légal, des personnes qui ne sont pas en règle car ne disposant pas de ce document. Après plusieurs allers et retours dans les CPAS, un premier projet de délibération allant dans le sens d’une harmonisation de la carte santé des personnes en ordre de mutuelle a été approuvé le 1er octobre 2021. Mais les changements de pratiques et la mise en œuvre de ce type d’accord prennent du temps. Ils doivent en effet être généralisés aux dix-neuf CPAS et il n’existe pas de pouvoir d’injonction en la matière, ni dans mon chef, ni dans celui de la Fédération des CPAS. Aujourd’hui, celle-ci nous confirme qu’un consensus a été atteint pour les personnes disposant d’un titre de séjour légal et conventionnées avec la mutuelle pour recevoir des soins.
Ce modèle comprend les éléments suivants :
– à partir de la date de notification de la fin de l’aide sociale d’origine, une carte de santé temporaire sera accordée pour une période de 30 jours. De cette façon, le « nouveau » CPAS tient compte de l’analyse sociale faite par le CPAS d’origine en vue de l’octroi de cette aide ;
– la carte médicale sera accordée à chaque bénéficiaire du revenu d’intégration ou de l’équivalent du revenu d’intégration ;
– la contribution à charge du bénéficiaire sera de 1,50 euro maximum par médicament pour les médicaments figurant sur la liste D.
Il reste à débloquer l’absence d’accord sur la systématisation de l’octroi de la carte médicale à tous les bénéficiaires du revenu d’intégration sociale.
Les différents points cités sont importants et démontrent que nous avançons dans la bonne direction.
Concernant les personnes sans permis de séjour légal, une première réunion a eu lieu en décembre dernier. La commission de la santé de la Fédération des CPAS bruxellois a également été mandatée pour travailler à l’harmonisation pour ce groupe cible. Dans ce contexte, deux groupes de travail ont été créés :
– le premier vise un accord entre les CPAS sur la définition de l’état de besoin et le mode de calcul qui ouvre le droit à l’aide médicale urgente, pour les uniformiser dans les dix-neuf communes. Ce groupe de travail espère aboutir en juin 2022 ;
– le deuxième s’attelle à trouver un accord sur la définition de la compétence territoriale et la définition concrète de la résidence habituelle, entre les dix-neuf CPAS. Cet accord effectif devra de surcroît être validé par le service public de programmation Intégration sociale (SPP IS), afin de rassurer les CPAS dans la mise en œuvre. En toute légitimité, ceux-ci ne veulent pas perdre
le droit au remboursement par le SPP IS.
Il faut noter que la Région doit pallier le manque d’harmonisation de l’aide médicale, en grande partie parce que le système Mediprima de l’État fédéral n’a pas été finalisé pour tous les prestataires de soins. Des discussions sont en cours avec l’État fédéral et les deux autres Régions et nous en saurons plus à ce sujet dans les mois à venir.
Nous n’hésiterons pas à vous faire part des avancées en matière d’harmonisations complémentaires dès que celles-ci feront l’objet d’un accord.
En ce qui concerne votre deuxième question, le groupe de travail chargé des groupes vulnérables est devenu le groupe de travail chargé de l’accès aux droits. Sa dernière réunion, en décembre
dernier, portait sur la crise énergétique et le lancement de sous- groupes de travail chargés de trois actions prioritaires. Ils lui présenteront le fruit de leur travail en février.
Un échange entre le secteur associatif et les CPAS est à l’ordre du jour au sujet des coordinations sociales et de l’harmonisation des pratiques des CPAS.
-> Retrouvez le compte-rendu intégral ici : http://weblex.irisnet.be/data/arccc/biq/2021-22/00008/images.pdf#page=49