« Monsieur le Ministre,
Chers collègues,

Sous l’impulsion d’Ecolo et de son ex-présidente Zakia Khattabi, l’accord de majorité conclu en début de législature a jeté les bases d’une belle avancée en matière de libertés individuelles, singulièrement en ce qui concerne les femmes. Elle prévoit en effet la levée de l’interdiction du port de signes convictionnels au sein des établissements de l’enseignement supérieur et de promotion sociale organisés par la (COCOF) Commission communautaire française.

Si je suis diplômée, c’est notamment parce que des écoles supérieures et des universités m’ont ouvert leurs portes, sans restriction et en acceptant pleinement qui je suis.

Si j’ai pu suivre des cours de piano, de chant et de théâtre, c’est parce qu’une académie de musique m’a accueillie sans distinction en acceptant pleinement qui je suis.

Si j’ai pu travailler dans une administration publique, c’est parce que l’employeur m’a jugée sur mes compétences sans a priori en acceptant pleinement qui je suis.

Tout cela n’aurait pu être possible si les autorités publiques en avaient décidé autrement.

Et pourtant, des femmes majeures portant un signe convictionnel se voient restreindre l’accès à l’éducation, à l’emploi ou à la culture en raison de l’expression visible de leurs convictions. Cela est totalement inacceptable ! Je tiens à rappeler qu’il s’agit clairement d’une violation de la Convention européenne des droits de l’homme qui garantit en son article 9 la liberté de manifester ses convictions.

Nous en sommes donc encore là, en 2020, dans une des régions les plus cosmopolites au monde à nous mobiliser pour des droits fondamentaux.

Très récemment, la Cour constitutionnelle a rendu un avis autorisant la Haute Ecole Francisco Ferrer à faire valoir son règlement d’ordre intérieur interdisant tout port de couvre-chef. Alors que certaines personnalités politiques locales notamment s’en réjouissent, d’autres vivent, légitimement, cette décision avec déception, incompréhension et amertume.  Cette situation a généré une large mobilisation autour du slogan #touchepasamesetudes qui se déploie sur les réseaux sociaux. Une manifestation s’annonce à Bruxelles le 5 juillet prochain et une pétition réunissant plus de 13.000 signatures circule actuellement sur internet.

C’est dans ce contexte que cet accord de majorité est une petite révolution en la matière et doit néanmoins être suivi des faits.

Lors de la séance plénière du 4 octobre dernier, vous aviez déclaré dans votre réponse à la question de mon collègue Kalvin Soiresse : «  il y aura bien une application stricte » dudit accord.

Un an plus tard, force est de constater qu’aucune avancée n’a eu lieu en la matière. (…)

Permettez- moi à cet instant de penser aux nombreuses femmes qui réussissent partout à travers le monde et dans tous les domaines comme Malala, prix Nobel de la Paix en 2014 et récemment diplômée de philosophie, de politique et d’économie de l’université d’Oxford. Le long foulard coloré rabattu sur sa chevelure n’aura constitué aucun frein à son émancipation.

Enfin, je voudrais terminer mon intervention par une citation de circonstance empruntée à Voltaire: « je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai jusqu’à ma mort pour que vous ayez le droit de le dire ». Je ne doute pas Monsieur le Ministre que vous vous battrez jusqu’au bout pour défendre la liberté des femmes de disposer de leur corps ».